Rock constate que le propane est mal desservi dans Charlevoix. Se fiant à son flair, il décide de choisir cette voie pour se lancer en affaires. Il prend alors la décision de contacter directement le directeur d’une importante compagnie de distribution de gaz pour lui proposer un partenariat. 

Gaz

Coup du destin ou ironie du sort, le dirigeant prévoit se rendre à Clermont deux semaines plus tard pour rencontrer deux personnes qui ont apparemment eu la même idée que lui. Une occasion que Rock ne laisse pas passer. 

« Je lui ai dit que s’il ne venait pas me voir à 10 heures le lendemain, j’allais trouver un autre partenaire et avancer sans lui. » 

Et le culot paye ! Après un long silence, le directeur, sûrement curieux d’observer de plus près le jeune ambitieux, accepte les conditions. Il ne sera pas déçu et les deux hommes concluront rapidement une entente de cinq ans. 

Il faut maintenant créer l’entreprise, assurer le financement, trouver un terrain et construire des bureaux. Heureusement, Rock peut compter sur l’appui de ses parents tout au long de ces étapes. 

J’ai plongé tête première en achetant un terrain dans le parc industriel de Clermont, et avec mon premier employé, on a travaillé tout l’hiver pour construire les bureaux. Un sacré défi !

Rock s’active, s’éreinte même, 100, 120 heures par semaine. On peut l’appeler
à deux heures du matin, il répond toujours présent. Personne ne croit en lui, mais il défie les préjugés et apprend rapidement les rudiments du métier. Il finit par déjouer tous les pronostics en se créant une belle clientèle dans la région après trois années difficiles. 

Arrive bientôt l’heure de la renégociation de contrat avec son fournisseur. Un moment pénible en perspective, puisque Rock a maintenant compris qu’il ne collabore pas avec un partenaire loyal. Depuis le début, le fournisseur lui cache son coût réel de raffinerie, empêchant Rock de connaître sa marge de profit et donc le juste prix à payer pour le gaz propane. 

Il réalise finalement qu’il a trop déboursé pendant toutes ces années. Ramené à cinq ans d’exploitation et des milliers de litres, il y a de quoi avoir le vertige. De plus, les réservoirs que Propane Charlevoix installe chez ses clients appartiennent au fournisseur. L’entreprise ne s’est donc pas constitué d’actif malgré cinq années d’activité. 

J’ai compris qu’ils me maintenaient sous respirateur artificiel pour pouvoir me racheter au bon moment. En fait, si j’avais continué dans ce sens, mes cinq années d’effort auraient été anéanties.

Comme il l’anticipait, Rock voit bientôt débarquer chez lui trois représentants du fournisseur, une mallette à la main. Mais, même affaibli, il n’a pas encore dit son dernier mot. 

L’entrepreneur accueille les hommes et place immédiatement sa main sur la valise en s’adressant à eux. 

« À voir cette mallette, je parierais que vous êtes venus me faire une offre d’achat qui tient compte de tout l’amour que j’ai pour ma compagnie, incluant le triple de temps que j’y ai travaillé depuis cinq ans. Du moins, je l’espère, parce que les offres insultantes ont tendance à me mettre de très mauvaise humeur. Par contre, moi j’ai une offre très sérieuse à vous faire : je vous rachète tous vos réservoirs ! » 

Contrôle

Bluffe-t-il ? Sur un point ? Sur toute la ligne ? Mieux vaut prévenir que guérir, et la mallette ne sera jamais ouverte. 

Débute alors un véritable parcours du combattant qui durera plus de six mois pendant lequel l’entrepreneur écume toutes les institutions financières de la région pour obtenir la somme nécessaire. 

Ça m’a pris du temps et de l’énergie, mais j’ai réussi à réunir le financement. J’ai signé l’entente et à partir de là, je suis devenu maître de mon destin.

Au début des années 2000, l’entreprise s’attaque au marché de Baie-Comeau avec succès. Rock y arrive par surprise et fait un grand ménage sur place dans le secteur du propane. Ses méthodes directes, la qualité de son service et sa transparence font la différence. Au même moment, une percée du côté ouest sur la Côte-de-Beaupré est imminente. 

L’entreprise entre ensuite à Québec et y ouvre une succursale en 2007. 

Fort de son succès, Rock commence à avoir des visées sur la région du Saguenay, mais cette fois-ci il décide d’ajuster son approche. 

À Québec, les gens trouvaient étrange d’être servis par une entreprise du nom de Propane Charlevoix. À Baie-Comeau, la population nous considérait comme des gens de l’extérieur. Je savais que je ne pourrais pas entrer à Saguenay avec les mêmes méthodes. 

En 2008, Propane Charlevoix devient alors Solugaz. Parallèlement, Rock trouve un partenaire bien implanté dans la région du Saguenay et s’associe avec lui. L’entreprise ouvre donc une nouvelle succursale dans la région sous cette nouvelle appellation. 

Je n’aurais probablement jamais réussi ce pari sans ces changements. Cette stratégie est certainement l’une de mes meilleures décisions d’affaires. 

En 2008, Solugaz s’est grandement développée. L’ajout continuel de nouveaux clients implique l’acquisition de réservoirs, de camions, et le recrutement constant d’employés. Solugaz réinvestit donc continuellement ses profits pour poursuivre cette croissance. Le bilan de l’entreprise s’en ressent et des décisions importantes s’imposent. 

Il faut faire un choix entre la consolidation ou la croissance. Cette dernière option oblige alors à trouver de nouveaux capitaux. Rock, visionnaire, décide d’ouvrir l’actionnariat de la compagnie. Il s’associe avec un partenaire particulièrement expérimenté dans la saine gestion des affaires. Un tournant dans la vision entrepreneuriale de Rock. 

Grâce à ce nouveau partenariat, l’homme d’affaires commence à intégrer les notions de planification stratégique et de rendement dans chacune de ses décisions, ce qui l’amène à déterminer la niche de Solugaz dans le marché du propane au Québec. Il en profite également pour faire un saut à l’École d’Entrepreneurship de Beauce pour solidifier un peu plus sa vision des affaires. 

À partir de ce moment, je me suis fixé comme objectif que Solugaz devienne le meilleur propanier au Québec. Maintenant, si un projet se présente mais qu’il ne cadre pas avec cette vision, on le laisse de côté. 

Dès lors, l’entreprise assainit ses finances et se concentre sur les occasions porteuses de sens. Elle acquiert des clients axés sur cette vision et développe progressivement le marché du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie. La qualité du service et le savoir-faire constituent le fer de lance de l’entreprise et lui permettent de se démarquer. 

En 2018, Rock redevient propriétaire unique de l’entreprise à la suite du rachat des parts de son ex-partenaire. Solugaz peut regarder de nouveau vers l’avant et décide alors d’effectuer un pas de géant. Elle construit un terminal ferroviaire à Saint-Augustin-de- Desmaures, avec une capacité de stockage de 1,5 million de litres. 

Ce choix nous a projetés dans la cour des grands.

En septembre 2022, Harnois Énergies devient partenaire de Solugaz, qui consolide ainsi sa position de leader dans le marché  du propane au Québec. 

Cette entente permet d’unir nos forces. Je suis très heureux d’avoir conclu cet accord avec Harnois Énergies, qui confirme la position dominante de Solugaz dans l’industrie.

Ce partenariat offre en effet une plus grande visibilité à l’entreprise et assure également sa pérennité. 

Par ailleurs, un centre multifonctionnel situé au même emplacement que le terminal ferroviaire sera livré au printemps 2023, un investissement total de près de 15 M$. Avec l’aboutissement de tous ces projets, pour son 30e anniversaire, Solugaz se hisse fièrement parmi les plus grands propaniers québécois. 

Pour Rock, à peu près tout dans l’entreprise s’exprime sous forme d’analogie avec le hockey. 

Il faut savoir repêcher les bons joueurs et les placer sur le bon trio, respecter les temps de glace et de repos… Et puis, chez Solugaz, il faut surtout avoir l’esprit d’équipe. 

« Quand une entreprise grandit, ses propres efforts se diluent au sein du travail d’équipe, même si l’on travaille 100 heures par semaine. J’ai donc appris à partager les responsabilités et à prendre le recul nécessaire. Je mets mon ego de côté pour m’entourer de gens plus forts que moi dans leur domaine. » 

D’ailleurs, c’est une philosophie qui s’étend au-delà du cercle des employés. Les partenaires commerciaux sont également considérés comme des membres de l’équipe. 

Solugaz s’implique aussi dans sa communauté par l’intermédiaire de commandites pour les équipes de hockey mineur. 

« Je trouve inconcevable que certains enfants ne puissent pas faire de sport faute de moyens. C’est un phénomène qui me touche particulièrement. Le sport, c’est la santé. » 

Une volonté sans faille